La Veuve aux Mille Rivières
De Ernest PÉPIN
Denise a mal. Denise ne dort plus, peine à vivre, et souffre de la perte d’une partie d’elle même. Denise est incomplète et ne sait plus comment « être ». Son mari, sa moitié, son double, son âme sœur, s’en est allé brutalement vers le royaume des cieux, la laissant désemparée.
A travers un récit raconté à la première personne, Ernest Pépin choisit cette fois de nous immerger dans les pensées d’une femme qui, plongée dans un maelstrom de tristesse, s’efforce tant bien que mal d’apprivoiser son veuvage.
Telle Pénélope attendant désespérément qu’Ulysse lui revienne à Ithaque, et Orphée prêt à marchander aux Enfers qu’on lui rende son Eurydice, Denise erre, et se refuse à accepter cette mort qui déséquilibre les fondements de existence : “Les gens n’ont pas idée. Ils croient qu’être veuve c’est seulement perdre quelqu’un qu’on avait ajouté à soi. Pour moi, c’est être amputée d’un être qui est en moi, qui est moi. Il erre quelque part dans l’espace et émet des signaux que je ne peux percevoir. Parce qu’il n’est nulle part, je le vois partout. Une feuille bouge, c’est lui. La pluie se déverse, c’est lui. Un oiseau passe, c’est lui. Une image me hante, c’est lui. Le repas brûle, c’est lui. Une forme dans les nuages, c’est lui. Tout partout, c’est lui. Lui en toutes sauces.”